Aujourd’hui encore, près d’un milliard de personnes continuent à souffrir de la faim sur notre planète. Selon les Nations Unies, la faim constitue le premier risque sanitaire dans le monde. Chaque année, la faim tue plus de personnes que le SIDA, le paludisme et la tuberculose réunis. Pour faire face à ce scandale intolérable, tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut produire plus de nourriture et surtout permettre aux plus démunis d’y avoir accès. La question est de savoir comment.
Le modèle agro-industriel qui s’est développé ces 50 dernières années dans les pays industrialisés n’a pas permis de supprimer la faim, en dépit de l’augmentation des rendements et de la productivité. Bien qu’elle ait permis certains succès en Asie (une certaine sécurité alimentaire), la révolution verte introduite dans les années 60 (qu’on peut résumer par la fourniture aux paysans de semences améliorées, intrants et crédit) doit être remplacée par d’autres stratégies qui ne provoquent pas les mêmes effets pervers : pollution, dégradation de la fertilité des sols, dépendance/endettement des paysans par rapport aux fournisseurs d’intrants. Les critiques et réticences face au modèle de développement agricole industriel axé sur les intrants externes sont aujourd’hui suffisamment importantes dans le monde pour qu’on puisse voir se développer des solutions alternatives, que ce soit au sein des pays industrialisés ou dans les pays du Sud.
L’agroécologie est une de ces alternatives, qui n’est pas seulement un ensemble de techniques culturales, mais aussi un mouvement, qui s’inscrit dans une démarche respectueuse de la terre et de l’environnement. Pour qu’elle soit réellement appliquée par les paysans, elle a besoin d’être diffusée et enseignée. Il est vrai que certains font de l’agroécologie sans le savoir, car ils ont toujours respecté les écosystèmes et leurs pratiques agricoles favorisent les échanges et la biodiversité, tout en assurant des récoltes satisfaisantes pour le cultivateur. On constate toutefois que le développement agricole (la « professionnalisation » ou « modernisation » de l’agriculture) dans les pays du Sud ne favorise généralement pas l’agroécologie. C’est la raison pour laquelle l’engagement en faveur de l’agroécologie si important, en particulier pour les pays qui ont décidé et commencé d’investir des montants plus importants pour développer leur agriculture. Nous sommes à la croisée des chemins. Nous devons sortir d’une logique de « prédation » par rapport à la nature pour retrouver un équilibre, une nouvelle relation avec la terre. Un changement de paradigme est nécessaire pour réellement prendre le chemin d’une agriculture durable. La large diffusion de l’agroécologie peut y contribuer, comme contribution à la réconciliation de l’homme avec la nature.